"DéCOUPLAGE": POURQUOI LES ÉTATS-UNIS RéDUISENT LEURS IMPORTATIONS DE PRODUITS CHINOIS à BAS COûTS

Les rayons des magasins du quotidien aux États-Unis ne vont bientôt plus être autant remplis de produits chinois. La société de conseil américaine Kearney tient à jour un indice dit de "relocalisation", en fonction de l’évolution des statistiques du ministère du Commerce. Et selon un associé, Patrick Van den Bossche, cité par le quotidien britannique Financial Times, la part de la Chine dans ces importations d’entrée de gamme en provenance d’Asie sera descendue sous le seuil des 50 % d’ici à décembre. Il y a dix ans, celle-ci était pratiquement vingt points au-dessus.

En soi, cette décrue n’a rien d’inconcevable. En septembre dernier, le président de la Chambre de commerce européenne à Pékin, Jörg Wuttke, considérait que 90 % des jouets, meubles, équipements sportifs ou vêtements fabriqués en Chine étaient facilement reproductibles ailleurs. Ce qui rejoint l’analyse de la banque allemande Deutsche Bank d’il y a 4 ans, qui a passé en revue plus de 700 produits chinois courants achetés par les Etats-Unis. Ils n’auraient de caractère irremplaçable à peu près que dans l’industrie chimique.

Le Vietnam en profite

En Asie, le Vietnam, la Thaïlande, l’Inde, l’Indonésie et la Malaisie apparaissent, dans l’ordre, comme ceux qui bénéficient le plus de cette réorientation américaine des flux. Le cabinet de conseil hongkongais Dezan Shira and Associates a ainsi décortiqué les dernières données des douanes vietnamiennes.

En avril, la majeure partie des exportations du Vietnam était destinée aux États-Unis. Cela représente plus du double de ses exportations destinées au deuxième débouché, la Chine. C'est également près de quatre fois plus que les exportations vietnamiennes vers le troisième pays de la liste, le Japon.

Dans un récent travail autour de la notion en vogue de "découplage", deux économistes de la banque américaine Morgan Stanley, Jitania Kandhari et Saumya Jain, ont, certes, attribué ces déplacements d’approvisionnements à l’épreuve de force géopolitique en cours. Mais le premier facteur qu’elles évoquent dans leur démonstration réside dans l’augmentation du coût de la main d’œuvre chinoise.

Joe Biden reste prudent sur le "découplage"

Une accélération de la tendance ne semble pourtant pas encore irrémédiablement acquise, le Trésor des Etats-Unis ne paraissant pas le plus pressé à ce que leurs magasins se passent de chaussures, meubles et jouets chinois.

Vendredi, dans une tentative supplémentaire de définir un terrain d’entente minimal, le responsable des dossiers internationaux du Trésor a rencontré l’ambassadeur chinois. L'échange a été qualifié, aussi bien par Washington que Pékin, de "franc et constructif".

Tout en continuant d’inciter à la réorientation des achats, le gouvernement de Joe Biden prend ses distances avec la notion de "découplage". On se rappelle, comment, en avril, sa ministre des Finances, Janet Yellen, a averti qu’il serait "désastreux". Et à cet égard, le South China Morning Post, à Hong-Kong, souligne que Washington est en train d’emprunter au lexique de Bruxelles, où depuis mars, il est question de "dérisquer" et non pas "découpler".

Pour reprendre l’analyse de Morgan Stanley, il s’agit là de passer d’un "cycle du juste à temps" pour un "cycle du juste au cas où". Comprendre que s’approvisionner en dehors de la Chine relève avant tout d’une affaire de sûreté commerciale.

La Chine pas inquiète de la montée de l'Inde

Ces précautions peuvent aussi convaincre les Chinois que, même si leurs produits courants ne vont plus être majoritaires dans les supermarchés américains, nul ne saurait les remplacer à lui seul.

La presse d’Etat de Pékin expose volontiers aux postulants asiatiques toute la distance à parcourir. Comme dans cet éditorial signé "GT Voice", publié jeudi, où il est disposé que "c’est après plus de quatre décennies d’efforts de réforme que la Chine a atteint sa puissance manufacturière actuelle" et d'ajouter qu'en "comparaison, l’industrie manufacturière indienne commence tout juste à trottiner", en conséquence de quoi "l’Inde ne doit pas oublier sa propre réalité et se perdre dans les flatteries occidentales".

Quoi qu’il en soit, le juge de paix sera le rapport annuel du commerce extérieur des Etats-Unis.

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