LA FIèVRE CHEZ DESCARTES

En appuyant sur le bouton de la dissolution, le président de la République espérait que la campagne électorale express permettrait de passer de la confusion à la clarification. Vingt et un jours plus tard, les Français peinent à comprendre quelle mouche a piqué Emmanuel Macron. Le chaos et la crise de régime semblent menacer le pays de Descartes... qu'on croyait être celui de la raison. La fièvre qui se serait, selon l'expression du chef de l'État, emparée du débat public n'est pas retombée. Et la fracture culturelle, qui coupe le pays en mille morceaux, semble plus béante que jamais. Résultat : ces élections ressemblent à un saut dans le vide mais... sans parachute !

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Tous les partis paraissent gagnés par la division et l'irresponsabilité, et on comprend alors la perplexité des Français au moment de voter. Aucun argument rationnel n'a imprimé durant cette courte campagne. Au lieu de ça, on a rejoué la réforme des retraites et promis l'impossible retour à 60 ans. On a entendu des responsables du RN brandir l'hallucinante interdiction des emplois publics aux binationaux ! Marine Le Pen a même réduit le rôle du président de la République et chef des armées à un simple titre honorifique... On n'ose imaginer ce qu'elle ferait si elle accédait au pouvoir.

Inquiétant chassé-croisé

Seule bonne nouvelle, la probable forte participation annoncée plus importante qu'aux européennes et aux législatives de 2022 constitue un motif d'espoir même si, ironiquement, Pierre Desproges disait que « l'adulte ne croit pas au père Noël. Il vote ». Participer, c'est s'intéresser. Aux électeurs de se rappeler qu'un bulletin de vote est plus puissant qu'une balle de fusil, selon le beau mot de Lincoln. La démocratie et son expression la plus noble, des élections libres, obligent chacun d'entre nous à un effort de raison, de tolérance et de civisme. Bien loin des paroles haineuses, des anathèmes et des rumeurs de guerre civile. En cette période de soldes, des candidats bateleurs promettent ristournes, promotions et cadeaux chimériques, mais notre République - et la plupart de nos concitoyens le savent - exige le prix fort, celui de la vérité, de la nuance et du bon sens.

Au moment où nos voisins britanniques s'apprêtent à renvoyer leurs élus conservateurs et brexiteurs qui les ont appauvris depuis huit ans et la sortie de l'UE, les Français seraient, eux, prêts à se jeter dans les bras des extrêmes. Inquiétant chassé-croisé.

La Grande-Bretagne a quand même perdu 2 millions d'emplois durant cette période et les investissements étrangers ont reculé de 31 % ! Voulons-nous vraiment de ce moment Brexit » que nous regretterions tous dans un an, deux ans, trois ans ?

En ce jour anniversaire de la mort de Simone Veil, que chacun ait à l'esprit ces paroles fortes de la plus sage d'entre nous : « Ce n'est pas si facile de combattre l'extrême droite. »

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